Aliev joue avec le feu



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Commentaires et Traductions de Gérard Merdjanian

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Commentaires

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La question qui se posait n’était pas de savoir «si» mais «quand» cela devait se produire. Ce qui devait arriver, arriva. Cette attaque n’a pas été une surprise pour nombre d’observateurs avertis et plus encore pour ceux qui sont aux commandes politiques et/ou militaires.

Ce ne sont pas les signes avant-coureurs qui manquaient.

1-   Depuis des années, Bakou se suréquipe en armements défensifs et offensifs auprès de nombreux fournisseurs, à commencer auprès des pays coprésidents du groupe de Minsk de l’OSCE - Russie, Etats-Unis et France, qui sont censés aider à la résolution du conflit ; mais qui ne se gênent absolument pas de pourvoir les deux côtés. Le commerce étant une chose, les propositions lénifiantes autre chose.

2-   Depuis l’arrivée au pouvoir du fils Aliev, les échauffourées sur la ligne de front, que ce soit à la frontière arménienne ou à la ligne de contact avec le Karabakh, n’ont fait que croître faisant de nombreuses victimes civiles et militaires, et notamment depuis l’été dernier.

3-   Depuis des années, les dirigeants azéris déclarent sur toutes les scènes internationales que l’Arménie est l’agresseur et qu’elle occupe militairement le territoire azerbaidjanais, mettant en avant les résolutions de 1993 du Conseil de sécurité de l’ONU.

4-   Depuis l’accord de cessez-le-feu signé en 1994, les pourparlers arméno-azerbaidjanais n’ont quasiment pas avancé, un statu quo décrié systématiquement par tout le monde, et plus particulièrement par Bakou, incriminant ainsi au passage les coprésidents du groupe de Minsk.

5-   Depuis des années, les déclarations des chefs d’Etat des pays coprésidents du groupe de Minsk, ou de leurs représentants -ambassadeurs sur le terrain, sont toujours génériques, se contentant de rappeler les normes internationales, sans jamais nommément citer quiconque et renvoyant dos à dos les antagonistes. Trois propositions sont sur la table des négociations, que l’Arménie accepte, et que l’Azerbaïdjan rejette partiellement.

6-   Depuis quelques années, le clan Aliev ne fait plus confiance aux coprésidents du groupe de Minsk pour progresser dans les négociations sur le Haut-Karabakh. Aussi, Bakou essaie de porter la résolution du conflit sur d’autres plates-formes que l’OSCE, comme l’APCE voire l’ONU.

7-   Enfin depuis ces dernières années, les dirigeants azéris ont clairement déclaré passer à la «vitesse» supérieure et résoudre le conflit du Karabakh par d’autres moyens que diplomatiques.

Samedi dernier, l’ambassadeur de l’Azerbaïdjan à Moscou a clairement indiqué que c’est bien Bakou qui avait commencé les hostilités en lançant une offensive d’envergure, terrestre et aérienne, dans les territoires occupés de l’Azerbaïdjan.

Malgré cela, tous les communiqués et déclarations émanant des chancelleries, de chefs d’Etat, de haut-fonctionnaires et/ou d’organisations internationales, utilisent exactement les mêmes termes que celles employés régulièrement par les coprésidents du groupe de Minsk, avec en plus cette fois-ci, des mots de compassion et insistant sur un cessez-le-feu immédiat.

Le seul effet positif de ces déclarations est que l’Azerbaïdjan a cessé son offensive massive pour se rabattre sur ses harcèlements permanents, c'est-à-dire les tirs quotidiens par de l’artillerie légère et lourde, soutenue maintenant par des drones armés.

On notera toutefois le parti pris pro-azéri du président de l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE), Pedro Agramunt, qui déclare après le bla-bla générique : «conformément aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, toutes les troupes armées arméniennes doivent se retirer des territoires azerbaïdjanais occupés".

On reste toutefois dubitatif sur le principal acteur qui tire les ficelles en coulisses : La Russie. Alors qu’il y une alliance et des accords militaires avec Erevan, que l’Arménie est membre de l’Union eurasiatique, que Moscou a la main mise sur toute l’énergie du pays et que de surcroit il est propriétaire des 3/5 des infrastructures, le Kremlin se comporte comme une puissance lambda sortant les mêmes généralités que ses congénères, et renvoie son allié arménien dos à dos avec son fidèle et gros client caucasien.

Par moment, le comportement de la Russie est identique à celui de la Turquie. Officiellement elle est l’alliée de l’Arménie, comme Ankara est allié à l’OTAN et fait partie de l’Alliance contre Daech ; Et à côté de cela, Moscou fournit de l’armement et commerce avec Bakou sur les produits énergétiques, comme Ankara fournit de l’armement aux combattants anti-Bachar-el-Assad et commerce avec Daech dans des domaines inavouables.

Au vu des propos des trois coprésidents du groupe de Minsk de l’OSCE à Erevan, il est clair que ni les uns ni les autres ne lèveront le petit doigt pour exercer une pression quelconque sur le trublion de Bakou, sinon verser des larmes de crocodiles sur les événements et réitérer pour la (n+1)ème fois leur rengaine. Après son coup d’essai et les molles réactions verbales, le dictateur İlham Heydər oğlu Əliyev a le champ libre pour réitérer ses «exploits» et multiplier les victimes.

 

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Traductions – revue de presse

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J’ai volontairement éliminé tous les communiqués et déclarations sus-cités qui n’apportent qu’un réconfort moral sachant que seuls la société civile, la presse, les ONG et/ou les associations ont apporté des précisions sur qui a fait quoi et pourquoi.

Toutefois, je n’ai retenu que deux déclarations liées à l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe:

-      Celle du représentant de l’Arménie à l’OSCE, l’ambassadeur Armand Guiragossian, devant l’Organisation réunie en session extraordinaire le 6 Avril ; qui résume les événements et donne le ressenti de l’Arménie.
 

-      Et celle des coprésidents du groupe de Minsk de l’OSCE le 9 Avril après qu’ils aient rencontré successivement les dirigeants des parties en conflit : Azerbaïdjan, Karabakh, Arménie.

 

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Extrait de Radiolour