Karabakh : Aliev menace de quitter les pourparlers de paix

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Traduction Gérard Merdjanian – commentaires

Tant que le processus de normalisation des relations arméno-turques était actif, le président Ilham Aliev a mis en sourdine ses velléités belliqueuses, laissant le soin à Ankara de mettre la pression sur Erevan en pré-conditionnant l'ouverture de la frontière arméno-turque avec la résolution du conflit du Karabakh à l'avantage de Bakou.

Maintenant que ce processus est ‘gelé', les dirigeants azéris, Aliev en tête, se relâchent et menacent de nouveau l'Arménie d'une intervention militaire, si leur point de vue ne prévaut pas dans le processus de négociations de paix entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Point de vue qui écarte absolument une quelconque séparation du Haut-Karabakh du giron azerbaidjanais, en clair l'intangibilité de ses frontières, versus situation d'avant-guerre. C'est ‘le point de détail' sur lequel bute la partie arménienne.

Alors que le printemps est censé annoncer le dégel, pour l'Arménie les deux processus en cours avec ses voisins turcs, ottomans et azéris, c'est un schéma inverse qui se met en place, face à l'intransigeance de ses interlocuteurs.

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"L'Azerbaïdjan pourrait refuser la poursuite des négociations avec l'Arménie et tenter de résoudre le conflit du Haut-Karabakh par la force si le processus de paix, qui dure depuis seize ans, ne débouche pas bientôt sur une avancée tangible," a mis en garde le président azerbaidjanais, Ilham Aliev.

S'adressant mercredi à des journalistes azéris au cours d'une visite à Istanbul, Aliev à de nouveau accusé l'Arménie de trainer les pieds sur les récentes propositions des médiateurs internationaux qui, selon lui sont ‘dans l'ensemble' acceptables pour Bakou.

"L'Arménie ne répond pas [aux propositions,] et je pense que les pays médiateurs doivent donner vigoureusement leur position", a-t-il dit. Il a exhorté les pays médiateurs, États-Unis, Russie et France, qui coprésident le Groupe de Minsk de l'OSCE, d'exercer une "forte pression sur la partie arménienne."

"J'ai maintes fois déclaré que nous ne prendrons plus part aux négociations pour faire de la figuration. Nous participerons au processus aussi longtemps que nous aurons l'espoir d'atteindre certains résultats. Ou bien, le problème passera de l'état ‘gelé' sur un autre plan. A savoir, la voie militaire. Voie qui n'a jamais été exclue, et pour laquelle nous devons être prêts." Ces derniers mois, les dirigeants arméniens ont reproché maintes fois à Bakou l'absence de progrès dans les pourparlers de paix sur le Karabakh. Mais ils doivent de leur côté clarifier la position officielle de l'Arménie sur ce que les médiateurs appellent une version "mise à jour" de leurs principes de base pour un règlement pacifique.

Le négociateur russe avait indiqué en Mars que la partie arménienne avait exprimé un certain nombre de réserves à la proposition modifiée. Mais il a refusé de les préciser.

Les dirigeants arméniens ont plutôt remis en question l'acceptation de l'Azerbaïdjan du document initialement présenté aux parties à Madrid à la fin 2007. Ils insistent sur le fait que les déclarations de dirigeants azerbaïdjanais vont à l'encontre d'un élément clé du document de Madrid qui envisage un référendum sur l'autodétermination du Haut-Karabakh, c'est-à-dire sur son statut définitif.

Ils indiquent que la population majoritairement arménienne du Karabakh votera pour l'indépendance de la région contestée, voire la réunification avec l'Arménie ou, ce qui est très peu probable, le retour sous la domination de l'Azerbaïdjan.

"Les dirigeants de Bakou déclarent qu'ils sont prêts à accorder un degré élevé d'autonomie au Haut-Karabakh au sein de l'Azerbaïdjan, ce qui est une tentative de prédéterminer les résultats de l'expression populaire et bloquer ainsi l'application du principe de « l'auto-détermination des peuples »," a déclaré mercredi devant le Parlement le ministre arménien des Affaires étrangères Edouard Nalbandian. Il a également dénoncé les menaces de guerre proférées par les dirigeants azéris, comme une tentative de ‘perturber les négociations.'

Mardi à Istanbul, dans un discours lors du Sommet sur la Sécurité régionale, Aliev a répété que son gouvernement n'accordera au Haut-Karabakh qu' "un degré très élevé d'autonomie" au sein de l'Azerbaïdjan. Mais il n'a fait aucune mention concernant un référendum.

Les modalités pratiques du vote sont l'un des principaux points de friction dans les pourparlers de paix, actuellement au point mort. Les parties en conflit sont également en désaccord sur certains aspects cruciaux, comme le retrait des troupes arméniennes des districts azerbaïdjanais entourant le Haut-Karabakh.

Le ministre azerbaïdjanais des Affaires étrangères, Elmar Mammediarov, a rencontré la semaine dernière les trois coprésidents du Groupe de Minsk, et a indiqué à sa sortie que "de nouvelles propositions" allaient être présentées pour tenter de relancer le processus de négociation. Il a également indiqué que des rencontres arméno-azerbaïdjanais au plus haut niveau ne seront possible que si les Arméniens affichent "un désir sincère de réaliser des progrès."

D'ailleurs, Aliev avait indiqué qu'il n'est pas prévu prochainement de réunions en tête-à-tête avec Sarkissian. Il a répété ses allégations antérieures que Sarkissian avait promis de répondre au règlement proposé dans les deux semaines, lors de leur dernière rencontre, à Sotchi en Janvier dernier. "Six mois se sont déjà écoulés, et il n'y a toujours pas de nouvelles," a-t-il déclaré.

Dans ce qui pourrait ressembler à un cas similaire, mardi Nalbandian a eu une conversation téléphonique avec son homologue russe, Sergueï Lavrov. Un communiqué du ministère arménien a déclaré qu'une discussion avait eu lieu portant sur les relations russo-arméniennes et des "échanges de point de vue sur les questions régionales d'intérêt commun." Mais sans plus de détails.

Extrait de Armenialiberty