Haut-Karabakh : Les Arméniens restent sceptiques quant aux résultats de la prochaine réunion de Kazan

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Traduction Gérard Merdjanian - commentaires

Négocier signifie accepter le principe des concessions, avec comme corolaire mettre son amour-propre en sourdine. L'accord-cadre, précédant l'accord de paix, doit avant tout permettre à la population du Karabakh de vivre non seulement en paix et en sécurité sur ses terres ancestrales dans des frontières internationalement reconnues mais également rendre viable ce territoire, c'est-à-dire ne pas être totalement noyé et entouré de districts azéris.

Selon toute logique, cela signifierait qu'à terme la RHK aura une superficie inférieure à celle d'aujourd'hui et que l'Azerbaïdjan ne récupérera pas la totalité de ses sept districts.

Sauf bien sûr, si Monsieur Aliev ne veut strictement rien céder.

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Le ministre des Affaires étrangères Edouard Nalbandian a confirmé mardi que l'Arménie et l'Azerbaïdjan pourraient bientôt parvenir à un accord-cadre sur le Haut-Karabakh, mais a prévenu qu'il devra être approuvé par les dirigeants du territoire contesté.

"Vous savez que le Ministère des Affaires étrangères [arménien] a diffusé une déclaration sur la réunion de Moscou disant que les parties ont réussi à rapprocher leurs positions sur un certain nombre de questions cruciales. Si cette tendance positive est maintenue à Kazan, alors nous serons en mesure d'enregistrer des progrès positifs," a déclaré Nalbandian aux journalistes.

S'exprimant lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue suédois en visite à Erevan, Carl Bildt, Nalbandian avait déclaré : "Il sera impossible de passer à la deuxième phase [du processus de paix] si le Karabakh n'est pas d'accord avec les principes de base. La deuxième phase consistera en l'élaboration d'un accord [complet] de paix, avec la participation effective du Haut-Karabakh."

"La pierre angulaire de règlement est le droit du peuple du Haut-Karabakh a être maître de son destin", avait-il ajouté.

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"Il peut y avoir une déclaration verbale à Kazan, qui reposerait sur des éléments des réunions précédentes. Toutefois, cela ne signifiera pas que l'on soit parvenu à un accord," a déclaré le directeur du Bureau Dat Hay et des Affaires politiques de la Fédération révolutionnaire arménienne (FRA-D), Giro Manoyan, lors d'une conférence de presse.

"La réunion du 25 Juin à Kazan peut mettre fin à l'humeur positive, mais ne donner aucun résultat, vu que le maintien de la paix est l'objectif principal des médiateurs à ce stade. L'Azerbaïdjan semble donner des signes de satisfaction, qui laisseraient entendre que Bakou ne veut pas être considéré comme la cause de l'échec," a-t-il ajouté, et de soupçonner que les médiateurs veulent créer une impression de progrès.

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Selon le président de la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale de la RHK, Vahram Atanassian, les attentes de la prochaine réunion des présidents à Kazan sont grandes, mais l'on risque de se trouver de nouveau face à un échec.

"Les déclarations faites par les ministères des Affaires étrangères de l'Arménie et l'Azerbaïdjan après leur réunion de Moscou, laissent à penser que certains accords ont été atteints et qu'un projet de document sera présenté aux présidents à Kazan."

"On peut espérer que l'Azerbaïdjan veuille poursuivre les négociations, acceptant le principe du non-usage de la force ou de la menace de la force. Je pense que c'est l'un des facteurs les plus importants à ce stade. Il sera alors possible de se battre plus activement pour la reconnaissance de facto du statut du Haut-Karabakh," a souligné Vahram Atanassian.

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Selon Gaïdz Minassian, chercheur associé à la Fondation française de la Recherche Stratégique (FRS) :

"Depuis près de trois ans les réunions diplomatiques se terminent par une déclaration des États du Groupe de Minsk ou par les présidents de l'Arménie et l'Azerbaïdjan lors de la médiation russe. Mais si les déclarations sont importantes, elles sont surtout symboliques et parlent seulement d'intentions. Mais les intentions ne sont pas des actes. Peu à peu, un processus parallèle au Groupe de Minsk s'est créé et aujourd'hui nous avons deux références pour le règlement du conflit du Karabakh : les Principes de Madrid et les principes de Sotchi. Les premiers sont moins génériques que les seconds."

Concernant la prochaine réunion de Kazan, M. Minassian a indiqué que : "il y aura probablement une déclaration de bonnes intentions, mais l'Azerbaïdjan et l'Arménie ne pourront pas aller plus loin qu'un rappel des principes. Reste à voir lequel, ceux de Madrid ou de Sotchi ? Là est toute la question. Personne n'est prêt à assumer le rôle de méchant aux yeux de Medvedev, Sarkozy et Obama, pas plus qu'aucun n'est prêt à sacrifier ses intérêts. Un nouvel accord a été greffé sur le processus de paix du Karabakh. La politique intérieure de l'Arménie et l'Azerbaïdjan peuvent créer de nouvelles conditions susceptibles d'influencer le cours des négociations."

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La non-reconnaissance du Haut-Karabakh a deux conséquences, l'une négative et l'autre positive, a déclaré le Président de la République d'Artsakh, Bako Sahakian, dans une interview au magazine Diplomatie Militaire.

"L'aspect négatif est que le pays est privé de la possibilité de recevoir l'assistance de diverses organisations internationales. Cela affecte bien évidemment notre économie. D'un autre côté, nous comptons sur nos propres forces et utilisons nos ressources de façon plus rationnelle."

"Les déclarations des dirigeants azéris suggérant qu'ils sont prêts à donner une grande autonomie au Karabakh en tant que partie intégrante de l'Azerbaïdjan, sont de la pure spéculation. De toute évidence, il n'y aura pas de retour au passé. Le Haut-Karabakh a disposé d'une autonomie au cours des 70 ans du régime soviétique, aussi, tout le monde est au courant comment cela s'est terminé. Le conflit avec l'Azerbaïdjan ne peut être réglé que par la reconnaissance juridique de la République indépendante du Haut-Karabakh à l'échelle internationale. C'est la volonté de notre peuple, ainsi que celle les autorités du Karabakh."

"Le maintien de la paix a été la principale réalisation des négociations sur la résolution du conflit du Karabakh. Il est impossible de finaliser le règlement du conflit du Karabakh sans la participation de l'Artsakh. En ce qui nous concerne, nous sommes prêts à des pourparlers directs avec l'Azerbaïdjan, répétés à plusieurs fois. Je crois que la restauration du format de négociation valide n'est qu'une question de temps," a-t-il souligné.

Comme le Président l'a en outre noté, "il n'y a pas de différences importantes dans la tactique des négociations entre Stepanakert et Erevan, et particulièrement, si l'on tient compte d'un certain nombre de questions en suspens entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan."

"Pour la première fois dans la pratique internationale une ancienne région autonome a obtenu la reconnaissance internationale de l'indépendance sans l'accord du pays de tutelle. La reconnaissance de l'indépendance du Kosovo a ouvert une nouvelle page dans l'accomplissement du droit des peuples à l'autodétermination."

Le Président a exhorté l'Azerbaïdjan à accepter la logique de l'irréversibilité des processus historiques en adoptant une position constructive lors des négociations, plutôt que torturer son peuple avec des illusions du passé. "Indépendamment de tout, nous continuerons la lutte pour notre reconnaissance internationale. Nous serions heureux si les précédents nous aidaient à progresser dans cette reconnaissance," a conclu le président Sahakian.

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Extrait de Armenialiberty, de Radiolour et de PanArmenian.net