Relations Arménie-Turquie : L'après Washington

***

Traduction Gérard Merdjanian – commentaires

Le 24 Avril approche, pour la majorité des observateurs, l'administration ne fera rien pour gêner la progression du processus arméno-turc. Processus actuellement gelé. Chacune des parties campant sur ses positions, réaffirmées haut et clair à Washington.

Si une nouveauté tout de même, côté Ankara :

En fait, la question du Karabakh est intégrée dans les protocoles car le passage :

« … Confirmant leur engagement, dans leurs relations bilatérales et internationales, de respecter et de garantir le respect des principes d'égalité, de souveraineté, de non-ingérence dans les affaires intérieures des autres Etats, l'intégrité territoriale et l'inviolabilité des frontières ;

Ayant à l'esprit l'importance d'une création et le maintien d'un climat de confiance et de respect entre les deux pays qui contribuera au renforcement de la paix, de la sécurité et de la stabilité dans toute la région,… »

Signifierait en clair, dixit Erdogan, que pour qu'il y ait une paix régionale, il faut que le conflit du Karabakh soit terminé et donc que l'Arménie se retire de l'Azerbaïdjan, et que le Haut-Karabakh retourne sous administration azerbaidjanaise.

Décidément, les bizarreries ottomanes du grand Vizir n'ont pas de limites.

***

*

Les optimistes

*

* Kalouste Sahakian


Kalouste-Sahakian6_medium
"La frontière arméno-turque pourrait s'ouvrir avant la ratification des protocoles. L'Arménie a fait tout ce qu'il avait à faire dans le processus et continue d'avancer, guidée par le droit international," a déclaré le Vice-président du Parti Républicain et président du groupe républicain au parlement, Kalouste Sahakian, lors d'une conférence de presse.

Il évalue la visite du Président à Washington comme un geste à caractère exceptionnel et historique. "Ce n'était pas seulement un succès diplomatique, mais aussi une amélioration de l'image de l'Arménie et de son Président sur la scène internationale."

* Aram Safarian


Aram-Safarian_medium
"Le parti ‘Arménie Prospère' apprécie hautement la visite du Président Serge Sarkissian aux Etats-Unis, ses rencontres et surtout le discours sur la tombe de Woodrow Wilson," a déclaré le président du groupe ‘Arménie Prospère' de l'Assemblée nationale, Aram Safarian lors d'une conférence de presse.

Selon le député, le président Sarkissian a exprimé l'opinion des forces politiques arméniennes unies sur le fait que l'Arménie ne fera pas de concessions sur le règlement du conflit du Karabakh et sur la reconnaissance du génocide arménien.

"Ce qui s'est passé à Washington a été le résultat de la politique ambitieuse de l'administration Obama pour faire avancer le processus arméno-turque, actuellement au point mort", a-t-il poursuivi, exprimant l'espoir que le processus va progresser.

Il est confiant que le dialogue va se poursuivre après le 24 avril. Commentant la ratification des protocoles, il a déclaré : "Si le Parlement turc les adopte sans réserves, l'Assemblée Nationale arménienne en fera de même."

Concernant le processus de paix du Karabakh, l'élu est convaincu que dès que l'Azerbaïdjan indiquera qu'il est prêt à reconnaître la souveraineté du Haut-Karabakh, toutes les autres questions seront discutées lors des négociations.

* Gagik Haroutiounian


Gagik-Haroutounian0_medium
"Les protocoles arméno-turcs ne sont pas morts mais malades," a déclaré le directeur de la Fondation ‘Noravank', Gagik Haroutiounian lors d'une conférence de presse. "Je pense qu'une nouvelle étape a commencé, où nous avons un avantage certain."

Il ne considère pas que le processus soit dans l'impasse.

Commentant la visite du Président Sarkissian à Washington et son discours au Mémorial de Woodrow Wilson, G.Haroutiounian a déclaré : "c'était un bon discours tant pour les Arméniens, que pour le public étranger."

Interrogé pour savoir si Obama va prononcer le mot génocide dans son discours du 24 Avril, le directeur de ‘Noravank' a répondu : "la situation politique actuelle dicte à Obama de s'abstenir de prononcer le mot génocide, mais on se sait jamais."

Gagik Haroutiounian n'attache pas beaucoup d'importance au discours d'Obama, car il n'aura pas de conséquences juridiques.

* Philip J. Crowley


Philip-Crowley1_medium
"Le processus est au point mort depuis l'automne dernier lorsque l'Arménie et la Turquie ont signé les protocoles sur la normalisation," a déclaré Philip J. Crowley, le Sous-secrétaire d'Etat, dans son briefing quotidien à la presse.

"Nous voulons voir la Turquie et l'Arménie ratifier ces protocoles, normaliser leurs relations, ouvrir les frontières. Cela aura des avantages significatifs pour les deux pays. Et nous continuons à travailler avec les deux pour voir si nous pouvons trouver la bonne formule, le bon moment pour la ratification et les avantages qui découleront de la ratification.

Nous continuons à travailler pour voir le comment – si je puis dire, il y a des choses que les deux pays se sont engagés à faire. Il y a des processus de travail difficiles avec leurs parlements respectifs. Nous avons la même démarche dans notre pays où le pouvoir exécutif peut prendre un engagement mais se doit de travailler avec le Congrès en termes de mise en œuvre ou pour ratification du projet. Nous savons que c'est un processus difficile. Nous savons que cela implique de l'émotion des deux côtés, des risques des deux côtés, et nous continuerons à travailler de manière constructive avec l'Arménie et la Turquie pour tenter de voir ce processus aboutir," a déclaré le Sous-secrétaire.

"Nous soutenons également le processus de Minsk en ce qui concerne l'Azerbaïdjan et le Haut-Karabakh », a-t-il ajouté.

*

Les pessimistes

*

* Aram Sarkissian


Aram-Sarkissian02_medium
"A ce stade, l'Arménie a réussi à occuper sa place et son rôle sur la scène internationale, et à révéler les mythes de la diplomatie rusée de la Turquie. C'est le résultat de la visite du Président Serge Sarkissian à Washington," a déclaré le président du Parti Démocratique, Aram Sarkissian, lors d'une conférence de presse.

Toutefois, cette avancée peut être temporaire si l'Arménie ne parvient pas à résoudre les problèmes intérieurs.

"Le ‘délai raisonnable' pour la ratification des protocoles a expiré. Il est temps de commencer un nouveau processus arméno-turque," a-t-il poursuivi. Aussi, l'Arménie doit revenir sur sa signature des protocoles.

"Etant un petit pays, l'Arménie est devenue une pierre angulaire dans la résolution des questions régionales et il devrait être celui qui conduit, mais pas celui qui est dirigé."

Quant à la reconnaissance du génocide arménien, Aram Sarkissian a indiqué : "Le 100e anniversaire sera le Rubicon pour la reconnaissance du génocide. Par conséquent, les Arméniens doivent mener une politique efficace pour obtenir un maximum de résultats au cours des cinq prochaines années."

* Hagop Chakerian - Stépan Stépanian


Hagop-Chakerian-et-Stepan-S
Que va-t-il se passer dans le processus arméno-turc, après la visite du Président Serge Sarkissian à Washington ? Le turcologue Hagop Chakerian et politologue Stépan Stépanian considèrent le voyage du Président Sarkissian à Washington comme un succès. Ils ont apporté une attention particulière au discours prononcé au National Cathedral.

"La diplomatie arménienne se développe," a dit Stépan Stépanian, en analysant les réunions et les déclarations du président. Selon lui, le discours à l'Université Memorial était fort et courageux.

Pour Hagop Chakerian, aucune avancée n'est à attendre compte tenu des problèmes internes de la Turquie : la question kurde, les changements constitutionnels ou l'affaire Ergenekon.

Radio Publique d'Arménie