Conflit du Karabakh : Le président arménien met les points sur les ‘i'.

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Traduction Gérard Merdjanian - commentaires

Le président a exprimé tout haut ce que nombre d'observateurs et d'experts déclaraient depuis longtemps dans leurs commentaires. Ce qui peut se traduire par : Dès que Bakou se sentira prêt assez puissant pour attaquer, il n'hésitera pas, même avec un fort risque de perdre la guerre.

Aliev compte essentiellement sur le grand frère turc pour le soutenir et surtout l'aider militairement. Et c'est là que son calcul risque de s'avérer faux. Par les temps présents, l'OTAN ne soutiendra pas la Turquie dans une telle aventure sachant qu'en face d'elle elle trouvera Moscou.

À vouloir prendre l'Arménie en tenaille avec Bakou, les dirigeants turcs y regarderont à deux fois, non seulement ils auront en face d'eux des soldats russes, voire de la CEI, mais surtout cela réduira à néant tout leur travail de ‘zéro problème avec les voisins', les négociations d'adhésion avec l'UE et plus grave les Etats-Unis mettront leur grain de sel pour arrêter cette aventure.

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Interview du président arménien à Moskovskie Novosti, à l'occasion du 20e anniversaire de l'effondrement de l'Union soviétique.

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"Le conflit du Karabakh ne doit être résolu que sur la base de compromis. Tout au long de ces années, nous avons été à la recherche de compromis. Cependant, il y a une ligne rouge : la population du Haut-Karabakh doit déterminer son propre avenir et toutes les possibilités de se développer sur sa terre historique dans la sécurité.

Le document prévoit le règlement de la question sur trois principes : - la non-utilisation de la force ou la menace de la force, - l'intégrité territoriale, - et le droit des peuples à l'autodétermination. Ce document fournit une occasion de poursuivre les pourparlers et de procéder à élaboration d'un traité de paix plus large.

L'Azerbaïdjan a aussi dit « oui » aux principes, après une longue réflexion, mais il interprète ces derniers selon leurs propres critères.

L'Arménie et l'Azerbaïdjan ont des interprétations différentes sur deux principes clés proposés par les médiateurs internationaux et qui sont au cœur d'un accord-cadre pour mettre fin au conflit du Haut-Karabakh," a déclaré le président Serge Sarkissian.

Il a fait référence aux principes de l'intégrité territoriale des États internationalement reconnue et du droit des peuples à l'autodétermination.

Les deux principes du droit international sont parmi les trois "principes fondamentaux" d'un règlement au Karabakh prôné par les pays coprésidents du groupe de Minsk de l'OSCE : les Etats-Unis, la Russie et la France.

"En ce qui concerne le droit à l'autodétermination, l'Azerbaïdjan interprète cela comme une simple autodétermination dans le cadre de l'intégrité territoriale de l'Azerbaïdjan. Une telle autodétermination n'existe pas, il s'agit d'une autodétermination illégale, primitive. Par conséquent, tant que l'Azerbaïdjan ne comprendra pas le sens de ce principe, il sera très difficile de progresser vers la résolution du conflit."

Le Président Ilham Aliev et les dirigeants azerbaïdjanais ont à maintes reprises déclaré que les Arméniens du Karabakh ne voteront que sur l'étendue de leur autonomie au sein de l'Azerbaïdjan. La partie arménienne s'est fermement opposée sur cette approche, affirmant que le référendum proposé doit effectivement leur permettre de formaliser la sécession du Karabakh à l'Azerbaïdjan.

Le Président Sarkissian a également insisté sur le fait que : "l'intégrité territoriale des États ne signifie pas l'inviolabilité des frontières. Sinon, de nouveaux Etats n'auraient pas été mis en place dans le monde. Et au cours des 20-30 dernières années, des dizaines de nouveaux Etats sont apparus sur la carte du monde.

Le Karabakh a défendu son indépendance dans une guerre sanglante et amère, dans des conditions extrêmement sévères, et il serait naïf de penser que la population du Karabakh puisse renoncer à ce qu'ils ont accompli," a-t-il souligné.

Toutefois, Sarkissian a de nouveau affirmé que Bakou se prépare peut-être à déclencher une nouvelle guerre pour le Karabakh. "Je pense qu'un tel risque existe parce que je ne comprends pas pourquoi Bakou désire sortir du processus de négociations. Ils ont probablement planifié une plus grande accumulation de forces [militaires] et de moyens pour pouvoir déclencher une nouvelle aventure militaire au moment opportun.

C'est une mauvaise approche parce que les événements pourraient se dérouler selon deux scénarios :

- Le premier est une guerre totale avec l'occupation subséquente du Haut-Karabakh, qui n'est possible que dans le cas d'une extermination totale de la population.

- Et le second est la défaite de l'Azerbaïdjan, avec comme corollaire la perte de nouveaux territoires. Et Bakou se plaindra de la perte de districts supplémentaires ...

Tous ces scénarios sont peu prometteurs."

Et d'ajouter : "L'Arménie envisagera la reconnaissance de la République du Haut-Karabakh que si les actions militaires sont reprises. Nous ne voulons pas reconnaître l'indépendance du Haut-Karabagh maintenant, parce que nous sommes en pourparlers, une reconnaissance signifierait l'échec des négociations. Les pourparlers sont préférables."

Selon 1news.az, le Vice-ministre azerbaidjanais des Affaires étrangères, Araz Azimov, a indiqué que Bakou est préoccupé par l'absence de résultats concrets dans le processus. "Nous ne voudrions pas que le côté opposé abuse de notre bonne volonté et de notre temps."

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** Réactions azerbaidjanaises *

* Hikmet Hajizadeh *


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L'ancien ambassadeur d'Azerbaïdjan en Russie et président du Centre éloigné (le Centre d'Etudes Politiques et Economiques), a présenté sa vision de l'évolution des événements en cas d'une nouvelle guerre au Karabakh.

"Si les autorités azéries déclenchent une nouvelle guerre au Karabakh, les événements qui suivront, ressembleront fort probablement au scénario de la guerre russo-géorgienne de 2008. La Russie interviendra, avec des avions sans signes distinctifs en traversant notre espace aérien. L'Azerbaïdjan perdra de nouveaux territoires, etc. Cependant, je ne vois pas ce scénario arriver," a déclaré Hikmet Hajizadeh.

Comme il l'a fait remarquer : "l'augmentation des incidents de violation de cessez-le feu fait partie de la stratégie azérie. Une véritable guerre serait tragique pour Bakou. La probabilité que Moscou soutienne l'Arménie pour céder quelques-uns des districts à l'Azerbaïdjan est inexistante. Peut-être que les médiateurs occidentaux font pression sur Erevan pour qu'il cède des territoires ; à ma connaissance, Moscou ne l'a jamais tenté. Et autant que je sache, Moscou a toujours défendu l'Arménie de faire de telles actions" ; rapporte newcaucasus.com

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* Novruz Mammadov *


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Le chef du département des relations internationales du Cabinet du Président Aliev, Novruz Mammadov, a déclaré que l'Azerbaïdjan a un certain point de vue et un plan d'actions pour la résolution du conflit du Karabakh.

Ainsi, Bakou "veut" pour y parvenir pacifiquement, mais "usera de son droit à la restitution des terres si nécessaire."

Malgré ces propos, toutes les actions et les déclarations des dirigeants azerbaïdjanais indiquent que Bakou aspire à autre chose qu'à une résolution pacifique du conflit.

Avec ses déclarations belliqueuses, les dirigeants azerbaïdjanais font d'une pierre deux coups.

- Premièrement, ils continuent à inciter la haine envers les Arméniens parmi la population azerbaïdjanaise, tout en sous-entendant qu'Aliev est capable de déclencher une nouvelle guerre pour se maintenir au pouvoir.
- Deuxièmement, il est probable que ces menaces empêchent les médiateurs d'aboutir au règlement définitif du conflit et de les obligent à retarder le processus.

D'autre part, cette situation ressemble à une poudrière qui peut exploser à tout moment. Les grandes puissances coprésidents qui misent actuellement sur le peu d'ambition présidentielle d'Aliev, peuvent un jour se lasser et ‘lâcher' le président azerbaïdjanais pour résoudre enfin le conflit du Karabakh.

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Extrait de Armenialiberty, de Radiolour et de PanArmenian.net