Le Groupe de Minsk de l'OSCE rentre en hibernation


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Traduction Gérard Merdjanian - commentaires

C’est clair qu’avec l’arrivée des prochaines élections dans tous pays concernés par le conflit du Karabakh, médiateurs et antagonistes, le groupe de Minsk aura du mal à faire progresser les négociations de paix. En 2012 les pays coprésidents ne mettront aucune pression lors des rencontres, et en 2013 ce sont les parties en conflit qui joueront la prudence.

Lorsqu’on fait le bilan de ces dernières années, les seuls progrès relevés se sont passés dans la régularité des rencontres, et surtout le maintien du cessez-le-feu, certes précaire, mais qui a évité une reprise des hostilités sur une grande échelle. Cela n’a hélas pas empêché d’avoir des dizaines de victimes des deux côtés de la ligne de contact, civiles et militaires.

Aussi, puisqu’il y a peu d’espoir que des progrès voient le jour, l’OSCE se doit d’éviter absolument que la situation se dégrade, ce qui revient à dire que les missions d’observation le long de la ligne doivent augmenter, et en qualité et en quantité, mais surtout se réaliser à l’insu de la partie adverse, et ce valable, bien évidemment, pour les deux côtés. On se demande ce qu’il y a à observer quand les tireurs d’en face sont prévenus sur la date et le lieu de la visite !

Autre hypocrisie à dénoncer, celle qui consiste à vendre des armes aux belligérants, offensives de surcroit. La citation latine ‘Si vis pacem, para bellum’ (si tu veux la paix, prépare la guerre) est trop souvent employée, surtout par celui qui a les moyens. Les bras armés des Etats-Unis (coprésident du groupe de Minsk) dans la région, à savoir la Turquie et Israël, sont les premiers dans ce négoce avec celui qui paie rubis sur ongle, pardon pétrodollars sur ongle.

Il faudra bien qu’un jour la communauté internationale prenne conscience que le droit à l’autodétermination des peuples prime sur l’intangibilité des frontières et n’est pas seulement un principe parmi d’autres.



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Le Vice-ministre des Affaires étrangères azerbaïdjanais, Araz Azimov, a avoué ne pas avoir d’attentes particulières suite à la visite régionale des coprésidents du Groupe de Minsk de l'OSCE. Ce qui est compréhensible.

Jusqu'à présent, toutes les visites des coprésidents se sont terminées par une déclaration d'intention, indiquant que tout sera fait pour obtenir une résolution rapide du conflit du Karabakh. Par ailleurs, les rumeurs d'un remplacement du coprésident français, Bernard Fassier, par l’ambassadeur en poste en Ukraine, Jacques Faure, ont été confirmées pour le 1er Janvier prochain, ce qui signifie que la dernière visite du Groupe avec le diplomate français, sera très probablement infructueuse.

Avec les prochaines élections tant en Arménie qu'en Azerbaïdjan, mais également dans les trois pays coprésidents - Russie, France et Etats-Unis, les autorités du pays vont probablement repousser le règlement du conflit au second plan. Compte-tenu de l'évolution, les coprésidents ont très certainement reçu des instructions pour maintenir la situation actuelle, et surtout empêcher une nouvelle guerre.

En outre, Bakou s’est habitué au fait que ni les représentants du groupe de Minsk de l'OSCE, ni aucune autre organisation, ne sont capables ou désireux à le forcer d’abandonner sa position destructrice, ou sa rhétorique militaire ou ses menaces de guerre renouvelées. Ce qui cause une petite surprise, car même la communauté internationale, démocratique et "pacifique", ferme les yeux sur la mort de soldats abattus suite aux violations continuelles du cessez-le-feu par les Azéris.

La guerre de tranchées se poursuit avec l'Azerbaïdjan, certain de son impunité, Bakou continue de faire traîner les pourparlers de paix, à travers le cliquetis de ses armes et de ses pétrodollars, endormant la vigilance des médiateurs avec des déclarations suggérant son adhésion à un règlement pacifique.

Il semble que le destin consiste pour l'Arménie et l'Artsakh, à réveiller les médiateurs endormis dans leur royaume du sommeil, pour montrer qu’ils sont vraiment prêts pour enfin parvenir à un règlement pacifique.

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* La FRA-Dachnaktsoutioun donne son point de vue *

"L'Azerbaïdjan met en avant la crainte de voir ses activités pétrolières péricliter en cas d’une nouvelle guerre au Karabakh. En fait, Bakou l’aurait commencé depuis longtemps, s'il était convaincu de sa victoire," a déclaré le Directeur du Bureau des Affaires politiques et du Hay Dat de la FRA-Dachnaktsoutioun, Kiro Manoyan.

Toutefois, il a exhorté l'Arménie à donner une réponse adéquate à dernière agression de Bakou sur la ligne de contact qui a fait deux victimes parmi les ‘appelés’ arméniens. "La communauté internationale doit protester contre les violations du cessez-le-feu par les Azéris, ce qui pourrait conduire à des conséquences indésirables pour les parties en conflit."

Pour le directeur, les deux prochaines années n’apporteront aucune évolution dans le processus de règlement du conflit du Haut-Karabakh, du au fait qu’en 2012 il y aura des élections présidentielles dans les pays médiateurs et en 2013 en Arménie et en Azerbaïdjan.

"Nous devrions intensifier le processus de reconnaissance de l'indépendance du Haut-Karabakh pour prévenir la situation de blocage par l'Azerbaïdjan du processus de négociation. Si ce dernier ne reconnaît pas le statut de la RHK hors de ses frontières, la communauté internationale ne tiendra pas compte de la position de Bakou," a-t-il souligné.

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Selon le politologue, l'absence d'une frontière commune avec la Russie, la Biélorussie ou le Kazakhstan complique l'affiliation de l'Arménie avec l'Union eurasienne. Aussi, c’est une question encore prématurée pour l'Arménie.

Toutefois, il est d'accord avec les analyses qui suggèrent que la formation de l'Union eurasienne est destinée à contrecarrer la Turquie, qui cherche à accroître son influence en Asie centrale.

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La possibilité d’une guerre avec l’Iran suscite nombre de préoccupations. Le chef du Bureau politique de la FRA n'exclut pas totalement un déclenchement, bien que très peu probable, des hostilités par Israël.

"Les opérations militaires affecteront négativement les relations diplomatiques Arménie-Iran. Nous devrions nous concentrer sur une politique équilibrée avec l'Iran sur les questions régionales. Une déstabilisation de l'Iran menacera également la sécurité nationale de l'Arménie."

Les Etats-Unis et ses alliés vont demander des sanctions plus sévères contre l'Iran sur son programme nucléaire, alors que le Pentagone ne prendra pas en charge les opérations militaires contre Téhéran.

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"Le seul avantage que l’Arménie peut tirer du maintien de sa signature des protocoles avec la Turquie, est d’être d’agréable avec certains de ses amis occidentaux qui insistent pour que le processus de ratification continue. J’exhorte l'Arménie d’arrêter le processus car il porte atteinte aux intérêts nationaux de notre pays."

Interrogé sur les propos du président turc Abdullah Gül qui suggérait que les relations Arménie-Turquie sont difficiles à réchauffer, Manoyan a répondu : "pourquoi la Turquie a-t-elle signée des protocoles normalisant les relations avec l'Arménie si c’est une tâche difficile à accomplir ? La Turquie est la seule à tirer bénéfice de la situation de blocage actuelle."

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Concernant le Sénat français, le politologue croit qu'il y a une chance réelle pour que la Chambre Haute adopte le projet de loi pénalisant la négation du génocide arménien. Le sénateur socialiste Philippe Kaltenbach vient d’annoncer sur son blog  qu’il allait présenter un projet loi reprenant celui adopté par l'Assemblée nationale le 12 Octobre 2006.

"Si dans le passé, des représentants du parti socialiste ont voté contre le projet de loi, cette fois leur soutien sera assuré, car ils sont majoritaires et les déclarations du candidat socialiste François Hollande vont dans le même sens. Très probablement, la Turquie menacera la France pendant quelque temps, mais la tension disparaîtra bientôt."

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* Brève Slovaquie *

Le 1er Président du Conseil national slovaque a salué l'adoption de la loi pénalisant le déni du génocide arménien.

"Le gouvernement de la Slovaquie vient d’adopter une loi pénalisant le déni du génocide, après celle de 2004 qui a qualifié de génocide les massacres de 1915 dans l'Empire ottoman. Ce qui laisse à penser que les valeurs d'humanisme ne sont pas perdues", a déclaré Frantisek Miklosko dans sa lettre adressée au Forum des Associations Arméniennes d'Europe.

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Extrait de PanArmenian.net