Rencontre Arméno-russe


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Traduction Gérard Merdjanian - commentaires

Les relations arméno-russes ne datent pas d’hier, et le conflit arméno-azéri sur le Haut-Karabakh a incité Erevan à resserrer ses liens avec Moscou ; les Accords militaires de l’été 2010 scellent la présence russe jusqu’en 2044, à travers la base militaire de Gumri. Aussi, même si Moscou n’interviendra pas directement en cas de conflit, cela donne à réfléchir aux faucons de Bakou, mais également aux velléités d’Ankara qui est tout prêt à porter secours à son fidèle vassal Aliev.

Cet Accord n’empêche pas la Russie de garder son mandat de coprésident - avec la France et les Etats-Unis, du groupe de Minsk de l’OSCE. Car dans les faits, c’est le président Medvedev qui pilote les négociations de paix entre les parties au niveau présidentiel, et son chef de la diplomatie, Serguei Lavrov, au niveau alter-ego ministériel.

On notera toutefois que si la France n’est pas aussi présente que la Russie par l’organisation de réunions trilatérales, elle fait parler d’elle simplement par le fait qu’elle s’intéresse à l’Arménie, aux Arméniens et à leur Histoire tragique. Par contre, on n’a jamais vu le président Bush ou le président Obama, outre leur rejet du mot ‘génocide’, mettre un pied sur le sol arménien, ce qui n’a pas été le cas des présidents Chirac et Sarkozy. Quant à Mme Hillary Clinton, sa visite éclair à Erevan avec un dépôt de gerbe en catimini au monument du génocide, a laissé un goût amer aux dirigeants arméniens.

Il est clair que la géopolitique et la géostratégie jouent à plein dans cette région. La vente d’armes à l’Azerbaïdjan depuis quelques années par Israël, avec la bénédiction de Washington, n’a rien d’innocent. Rien d’innocent non plus la présence du Mossad (Services secrets israéliens) ou du MIT (Services secrets turcs), d’abord en Irak et maintenant en Syrie et en Iran. L’Occident prépare le terrain par alliés interposés. Si le président Ahmanidejad arrive à ses fins, c'est-à-dire qu’il fabrique une bombe atomique, il ne sera suffisamment pas fou pour la faire exploser, sachant que c’est le chaos régional, voire plus, qu’il déclenchera et pour lui-même et pour tous les peuples du Proche et du Moyen-Orient, Sud-Caucase compris.

Rien d’étonnant donc si la Russie freine des quatre fers pour éviter le pire. Les va-t-en-guerre américains et leurs godillots, entendez par là les Anglais et les Français, n’ont pas tiré les leçons de la guerre en Irak et en Afghanistan. Tout cela pour permettre à Israël de vivre en paix, ce qui est fort louable ; mais également son corolaire, à savoir continuer d’annexer les territoires adjacents, ce qui n’est pas louable du tout.

"Qui joue trop avec le feu, finit par se brûler." (Proverbe Togolais)


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Lundi, la Russie et l'Arménie se sont prononcées contre une éventuelle action militaire occidentale contre l'Iran. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a indiqué qu’une telle action aurait de «très grave» conséquences pour la sécurité régionale.

S'exprimant à l'issue des entretiens à Erevan avec son homologue arménien Edouard Nalbandian, M. Lavrov a déclaré que les tentatives pour mettre fin par la force à la crise nucléaire de l'Occident avec Téhéran déstabilisaient non seulement le Moyen-Orient, mais aussi le Sud-Caucase.

"Il est difficile de prédire les conséquences [de l'action militaire], mais elles seraient évidemment très graves et négatives. Elles auraient une incidence sur la sécurité non seulement de l'Arménie, mais aussi sur celle de l'Azerbaïdjan compte tenu du fait qu'il y a trois fois plus d’Azéris en Iran qu’en Azerbaïdjan. Il est difficile de prédire comment ces Azéris iraniens réagiront à l'utilisation de la force militaire contre leur pays. Mais, à Dieu ne plaise, ce qui se passera alors c’est qu’il y aura sans aucun doute un important afflux de réfugiés et une grande partie de ces réfugiés se retrouveront en Russie étant donné l'existence d'une importante diaspora azerbaïdjanaise," a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse commune.

Moscou est vivement opposé à l'utilisation de la force, par les Etats-Unis, les pays occidentaux et surtout Israël, depuis que l'Iran a lancé un programme nucléaire controversé. Lavrov a réaffirmé la position de la Russie, que cela allait à l'encontre du droit international.

Edouard Nalbandian a indiqué que l'Arménie est également contre les frappes aériennes et d'autres opérations militaires contre les installations nucléaires iraniennes. "L'Iran est un voisin de l'Arménie et nous privilégions les solutions par le dialogue et les négociations aux problèmes concernant l'Iran, plutôt que l'utilisation de la force", a-t-il souligné.

Le bras de fer iranien ainsi que la situation en Syrie étaient apparemment sur l'ordre du jour des pourparlers entre les deux ministres, que Nalbandian a qualifié de "dialogue politique de niveau élevé". Il ressort notamment qu'ils ont discuté "des développements en cours dans le Moyen-Orient" et ont été d'accord sur "la nécessité de résoudre les problèmes par le dialogue."

Bien évidemment, Lavrov et Nalbandian ont discuté de manière "détaillée" des efforts internationaux visant à mettre fin au conflit du Haut-Karabakh.
Pour la Russie, l'Arménie et l'Azerbaïdjan sont des "partenaires stratégiques" et Moscou poursuivra avec sa médiation sur le Karabakh. Lavrov a également défendu le travail du Groupe de Minsk de l'OSCE, dont la Russie est coprésidente avec les Etats-Unis et la France. Nalbandian a fait l'éloge de la Russie pour sa participation active dans le processus de négociation.

"Le Groupe a correctement exercé ses fonctions, sans reculer sur les principes de l'Acte final d’Helsinki, les documents fondamentaux de l'OSCE ou la Charte des Nations Unies. Nous avons entendu des déclarations différentes, parfois émotionnelles ou non officielles, mais nous sommes habitués à nous guider par les positions officielles. Les positions officielles de l'Arménie et l'Azerbaïdjan sont reflétées dans la déclaration conjointe des chefs des deux Etats et des trois coprésidents, adoptée lors du sommet de l'OSCE à Astana en 2010. Les déclarations adoptées à la suite de réunions trilatérales entre les présidents Medvedev, Sarkissian et Aliev donnent une haute appréciation au travail des médiateurs, y compris des efforts personnels du président Medvedev," a indiqué le chef de la diplomatie russe.

Lavrov a rappelé la dizaine de réunions avec ses homologues arménien et azerbaïdjanais avec l’objectif de parvenir à un Accord-cadre sur les principes fondamentaux devant servir de base au traité de paix final. "Le travail n'est pas terminé, et pendant la réunion à Sotchi, le 23 Janvier dernier, les présidents ont exprimé leur volonté de poursuivre leurs efforts pour parvenir à un Accord. La Russie est prête à faire de son mieux pour contribuer à ces efforts, en tenant compte de la volonté des parties," a-t-il ajouté.

Le ministre russe a rencontré le Premier ministre Tigrane Sarkissian en fin de journée. Une déclaration du gouvernement arménien a indiqué que la réunion a porté sur les questions économiques. "La Russie est notre partenaire stratégique et nous devons élargir et renforcer les relations bilatérales", a déclaré Sarkissian au ministre russe.

Rappelons que les présidents arménien et russe ont tenu 40 réunions au cours des trois dernières années, le dialogue politique est à un niveau élevé, les relations commerciales et économiques se sont fortement développées, le chiffre d'affaires des produits de base entre les deux pays s'élève à un milliard de dollars, les investissements russes en Arménie à trois milliards.

Un timbre commémorant le 20e anniversaire des relations diplomatiques arméno-russes a été officiellement émis.

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"Le plan de paix proposé par Kofi Annan pour mettre fin à la violence en Syrie doit être jugé par le Conseil de sécurité des Nations Unies et non par les Amis du groupe Syrie. Maintenant que M. Annan a reçu un mandat du Conseil de sécurité, ce dernier décidera de ce qu’il convient de mettre en œuvre des propositions de M. Annan," a déclaré Sergueï Lavrov, lors de la réunion avec les étudiants de l’Université d’Etat d’Erevan.

Selon les données officielles russes, les Amis du groupe Syrie ne peuvent pas remplacer le Conseil de sécurité de l'ONU. Moscou a refusé de participer au Sommet des Amis du groupe Syrie à Istanbul le 1er Avril dernier, car il soutient la mise en œuvre du Plan Annan, voté par tous les membres du Conseil de sécurité de l'ONU, à la réunion du 21 Mars.

Le plan onusien appelle à la fin de la violence en Syrie, à la fourniture d'une assistance humanitaire aux personnes dans le besoin et à lancer un dialogue politique inclusif.

* Brève OSCE *

Le ministre lituanien des Affaires étrangères et président en exercice de l’OSCE, Audronius Ažubalis, arrivera à Erevan pour une visite officielle de deux jours, le 4 Avril. Il rencontrera le président Serge Sarkissian et son homologue Edouard Nalbandian. Le règlement du conflit du Haut Karabakh et le développement des relations bilatérales seront à l’ordre du jour.

À l'heure actuelle, Ažubalis est en visite pour 3 jours en Azerbaïdjan, où il va rencontrer le président Ilham Aliev, le Premier ministre, Arthur Rasizade, et le ministre des Affaires étrangères, Elmar Mammadyarov.

* Brève Slovaquie *

Le Président de la Cour constitutionnelle arménienne, Gagik Haroutiounian et le président de la Cour de cassation, Armand Meguerdoumian, sont en Slovaquie à l'invitation du président de la Cour Suprême, Štefan Harabin.

Le 2 Avril, ils ont participé au séminaire intitulé : "Les questions juridiques de crimes contre l'humanité", organisé par l'Académie Juridique de la République slovaque. M. Haroutiounian a présenté un certain nombre de sujets liés au génocide arménien et sur la loi pénalisant la négation.

Le 3 Avril, les représentants arméniens vont rencontrer le Procureur Général de la Slovaquie pour discuter des relations bilatérales. Ensuite, M. Meguerdoumian fera une conférence devant les étudiants de l'Université Paneuropéenne.

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Extrait de Armenialiberty, de Radiolour et de PanArmenian