Attentat de Suruç : Des éléments pour le moins troublants




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Commentaires et Traductions de Gérard Merdjanian

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Commentaires

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Quelques éléments factuels :
-      L’attentat de Suruç qui a fait 32 morts et une centaine de blessés a été attribué par la Turquie aux Djihadistes du Daech.
-      Les victimes sont de jeunes universitaires. Nombre d’entre eux étaient affiliés au parti pro-kurde HDP. D’autres étaient de jeunes socialistes sensibles à des causes plus activistes, souvent réprimés par les autorités turques, et considérés par le gouvernement comme des organisations terroristes.
-      Suruç est située à une cinquantaine de kilomètres au Sud-ouest d’Urfa et à une dizaine de kilomètres de la frontière syrienne, proche de Kobané. Elle est majoritairement peuplée de Kurdes.
-      Officiellement Ankara fait partie de la coalition mais n’a jamais mis ses aéroports à la disposition de la coalition, pas plus qu’une quelconque participation aux actions militaires.
-      Ankara a toujours considéré le PKK comme une organisation terroriste, comme d’ailleurs les Etats-Unis, malgré le fait qu’un début de dialogue constructif ait été amorcé entre Erdoğan et Ocalan.
-      Ankara a donné des signes d’ouvertures envers sa minorité kurde tout en les surveillant de près, histoire de faire plaisir aux Occidentaux et plus particulièrement à l’UE en vue de son adhésion, mais surtout pas question d’une quelconque autonomie.
-      Enfin Ankara craint par dessus tout
la création près de ses frontières d’un Kurdistan indépendant.

Quelques éléments troublants :
-      Ankara combat le régime de Bachar al-Assad en soutenant les opposants, mais lesquels ?
-      Les otages du consulat turc de Mossoul (Iraq) aux mains de l’Etat islamique ont été libérés, grâce à l’activité des services secrets turcs (MIT), mais en échange de quoi ?
-      Ankara est censé maintenir sa frontière syrienne fermée et éviter que des candidats djihadistes la traverse. Hors, celle-ci est poreuse quand il s’agit de djihadistes mais hermétique quand il s’agit de Kurdes voulant aider leurs compatriotes qui se battent.
-      Officieusement les relations entre la Turquie, gouvernée par un parti islamo-conservateur, et le Daech restent très ambigües.
-      Daech vend son pétrole sur le marché parallèle en transitant par la Turquie.
-      Au lendemain de l’attentat de Suruç, l’aviation turque bombarde de nombreux sites du PKK et quelques sites djihadistes non stratégiques.

Quelques éléments de réflexion :
-      A qui profite le crime, ou plus exactement l’attentat ?
-      Le parti au pouvoir (AKP) a perdu de nombreux sièges aux dernières élections législatives et notamment la majorité absolue au parlement et ce au bénéfice d’un parti pro-kurde, le HDP.
-      Le fait de réagir avec brutalité aux événements lui permet de s’attirer la sympathie des extrémistes nationalistes (MHP) et peut-être de pouvoir compter sur eux pour mettre en place le nouveau gouvernement.
-      Pourquoi s’en prendre tout de suite au PKK, alors que le dit attentat a été commis par un djihadiste de l’EI ?

Partant de ces éléments et constatant que c’est toujours l’ancien gouvernement qui est en place faute d’alliance, deux options se font jour :
-      Soit une version angélique. Ankara a profité de l’opportunité que lui offrait l’attentat, pour nettoyer les poches du PKK agissant en Syrie. Et pour montrer qu’il est avec la coalition, et donc toujours l’allié fidèle de Washington, a attaqué des positions de l’EI.
-      Soit une version machiavélique. Le MIT a travaillé dans l’ombre avec des djihadistes pour arriver au résultat que l’on connait. Le tout saupoudré de quelques frappes sur l’EI pour s’attirer la sympathie des Occidentaux. De surcroit quand les victimes de l’attentat ne sont pas spécialement en odeur de sainteté auprès du gouvernement,  cela s’appelle de la provocation.

Connaissant le comportement des Ottomans, qu’ils soient d’hier ou d’aujourd’hui, envers leurs opposants et leurs minorités, la seconde option me semble la plus probable.

Dans les deux cas Erdoğan sort gagnant, avec en prime les encouragements des Etats-Unis (Cf. les propos de Brett McGurk) et de l’OTAN.

En attendant, la dite coalition continue de fournir en armes les combattants kurdes syriens et irakiens, alors que la Turquie les bombardent ; cherchez l’erreur !

 

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Traductions – revue de presse

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Suites de l’attentat suicide de Suruç

"Les Etats-Unis condamnent les récents attentats commis par les terroristes Kurdes du PKK en Turquie. Il n'y a pas de relation entre ces frappes aériennes contre le PKK et les récents accords pour intensifier la coopération entre les Etats-Unis et la Turquie contre l'EI", a déclaré Brett McGurk, ambassadeur, adjoint de l’envoyé spécial présidentiel à la Coalition internationale pour contrer L’E.I, et vice-secrétaire d'Etat adjoint pour l'Irak et l'Iran, au Département d'État américain.

Après avoir longtemps été réticente à s'engager dans la lutte contre l'Etat islamique, et en représailles à l'attentat suicide de Suruç, la Turquie a commencé à bombarder

 
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Turquie

La résolution votée à la quasi-unanimité par la Chambre belge reproduit les propos du premier ministre, Charles Michel, qui a reconnu le 18 juin, devant la Chambre, le génocide au nom du gouvernement belge. Toutefois, le texte reste très ambigüe car il ne comporte pas de disposition proposant que le parlement belge doit faire de même, mais surtout indique que la Turquie actuelle ne saurait être tenue pour responsable historiquement et moralement du drame vécu par les Arméniens de l'Empire Ottoman.

Cela n’a pas empêché Ankara, comme à l’accoutumé, de réagir fermement.


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Azerbaïdjan

Le Ministère de la Défense azerbaïdjanais a amèrement réagi à la récente déclaration du ministre arménien de la Défense, Seyran Ohanian, exhortant les autorités azerbaïdjanaises à éviter toute rhétorique militaire.
 

«L’adversaire doit éviter les spéculations. Au lieu de faire des mouvements constructifs, il essaie de ne laisser aucune pierre debout en Arménie. En augmentant la tension sur la ligne de contact, la partie azerbaïdjanaise essaie de créer des conditions favorables pour elle-même,» avait déclaré Seyran Ohanian.

En réponse, l’Azerbaïdjan a déclaré : "Nous devons rappeler à Mr Seyran Ohanian la force du soldat azerbaïdjanais. Et même, bientôt."

Les médias azerbaïdjanais spéculent déclarant que cette déclaration n’est rien d'autre que "l’annonce" d'une opération militaire imminente.

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Brésil

L'État de Rio de Janeiro a reconnu le génocide arménien, le vendredi 24 Juillet établissant le 24 Avril comme "Jour de la reconnaissance et de la mémoire des victimes du génocide arménien".

Rio de Janeiro est le quatrième Etat au Brésil à reconnaître le génocide, avec Parana, Ceara et Sao Paulo. Il y a quelques mois, le Sénat brésilien avait voté une motion de solidarité avec le peuple arménien pour le centenaire du crime contre l'humanité.

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Le coin des analystes et des observateurs



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Extrait de Radiolour, de PanArmenian, de News.am, de Lrakir, de Today.az, de News.az, de Zaman, de Hurriyet ainsi que de la presse française.