***
Traduction Gérard Merdjanian – commentaires
L'Artsakh suit la voie qu'elle s'est tracée et vient de reconfirmer son désir d'indépendance par les élections législatives de Dimanche dernier. Et comme il se doit, toutes les institutions internationales ont critiqué cet évenements.
L'UE par la voix de sa Haute représentante pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, Catherine Ashton, a exprimé son désaccord :
"Je tiens à rappeler que l'Union européenne ne reconnaît pas le cadre constitutionnel et juridique dans lequel les ‘élections législatives' dans le Haut-Karabakh se tiendront ce Dimanche. Cet événement ne doit pas préjuger du règlement pacifique du conflit du Haut-Karabakh.
Je réitère notre ferme soutien au Groupe de Minsk de l'OSCE, et les travaux des trois coprésidents et de leurs efforts pour un règlement du conflit, et qui appellent les parties à redoubler d'efforts pour trouver une solution négociée au conflit. Je rappelle que l'UE est prête à offrir un soutien complémentaire à cette fin."
De leur côté les coprésidents du groupe de Minsk de l'OSCE ont sorti le communiqué suivant :
"Les coprésidents estiment que les élections ne devraient pas anticiper la détermination du statut juridique définitif du Haut-Karabakh dans le large cadre du règlement pacifique du conflit du Haut Karabakh."
Il n'est pas besoin d'être devin pour deviner les propos des ‘Etats frères turcs' sur le sujet.
La question cruciale reste toujours la même : Ilham Aliev arrivera-t-il à ne pas basculer du ‘coté obscur de sa Force' ?
***
Tout le monde est occupé à vouloir "solutionner" le conflit du Karabakh, qui, comme nous l'avons mentionné à de multiples reprises, a été réglé en 1994. Parfois, il semble que tout homme politique ayant le moindre rapport avec le Sud-Caucase, considère de son devoir de donner son point de vue sur le règlement du conflit. Ainsi, il y a quelques jours le ministre des Affaires étrangères géorgien, Grigol Vashadze, y a été de son couplet, déclarant que la situation dans le Sud-Caucase peut dégénérer à tout moment.
Le diplomate géorgien estime que la région a une merveilleuse expérience de la coopération entre trois pays : Azerbaïdjan, Géorgie et Turquie, avec la mise en œuvre de gros projets économiques. "A titre d'exemple on peut citer les deux pipelines en activités (Bakou-Tbilissi-Ceyhan, Bakou-Tbilissi-Erzurum), le chemin de fer en cours de construction (Bakou-Tbilissi-Kars) en un tout cohérent avec un futur lien entre l'Asie centrale et l'Europe. Et je ne parle pas des petits projets. D'un autre côté, la situation est très fragile car il y a les territoires occupés de Géorgie - 20% des terres géorgiennes sont occupées par la Russie -, 10% de la population géorgienne sont devenues des réfugiés et déplacées de force de leur propre foyer. Il y a le problème du Haut-Karabakh, c'est-à-dire le problème de l'intégrité territoriale de l'Azerbaïdjan. Il y a aussi les relations qui se nouent entre la Turquie et l'Arménie. Tous ces problèmes peuvent à tout moment faire exploser la situation dans la région", a déclaré Grigol Vashadze. Curieusement, le ministre a oublié de parler des 20% du territoire de l'Azerbaïdjan fraternel [occupés par l'Arménie] et du million de réfugiés. Ou peut-être, a-t-il estimé que ce n'était pas important de les mentionner ? Quoi qu'il en soit, depuis un certain temps la Géorgie est ballotée de gauche à droite, incapable de décider avec qui c'est le plus rentable : l'Islam ou le monde chrétien ?
Le conflit attire aussi tout officiel qui visite l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Leurs déclarations sont devenues un mantra ordinaire : - l'intégrité territoriale, - le règlement pacifique du conflit, - ou le droit des peuples à l'autodétermination. Parfois, le problème du Karabakh est discuté par des gens qui ne peuvent même pas le situer sur une carte. Et même s'ils le peuvent, ils le confondent le plus souvent avec l'Azerbaïdjan. Avec toutes les questions qui ont été soulevées par un article publié dans le quotidien turc Hurriyet sur la cession présumée de deux districts à l'Azerbaïdjan [ndlt : Latchine et Kelbadjar, cf. article]
http://eafjd.eu/spip.php ?breve2486
, il y a une question importante qui se pose - "Pourquoi Latchine et Kelbadjar en particulier ?" On aurait aussi bien pu mentionner Aghdam et Fizuli, ou deux autres districts ... La deuxième question est : pourquoi la Turquie de manière aussi systématique se prête-t-elle à l'agitation de Bakou, sachant parfaitement que cette dernière est par défaut erronée. La solidarité islamique ne joue pas ici, mais c'est plutôt les dividendes politiques qui sont prises en compte. Et si, demain, dans un souci d'améliorer son image politique Ankara se devait de soutenir l'Arménie, elle le ferait sans hésiter.
Pour l'instant, le ministère turc des Affaires étrangères a publié une déclaration concernant les élections législatives partielles en Artsakh (République du Haut-Karabakh). "Officiellement, Ankara ne reconnaît pas l'élection qui aura lieu le 23 mai," indique le communiqué. Eh bien, qu'elle ne le reconnaisse pas, et alors ? A la longue Bakou devra bien se rendre compte de l'existence de la RHK sur la mappemonde, qu'elle veuille ou non la reconnaitre. C'est aussi irréaliste que de croire qu'un jour la Turquie puisse devenir coprésident du Groupe de Minsk de l'OSCE. De surcroit, cette demande n'émane pas de nous, mais de la partie turque elle-même, qui ne peut guère être comptée parmi les amis de l'Arménie. "La Turquie ne pourra jamais devenir coprésident du Groupe de Minsk, c'est tout simplement impossible. L'Arménie y est opposée, et par conséquent cette question est hors de propos. Concernant les déclarations des dirigeants turcs sur le conflit du Haut-Karabakh, ce sont simplement des manœuvres politiques, sans lesquelles il est difficile de construire sa politique dans la région," a déclaré Mitat Celikpala, professeur agrégé, titulaire de la chaire des Relations Internationales à l'Université d'Economie et de Technologie d'Ankara (TOBB).
Karine Ter-Sahakian – PanArmenian – Département Analyse