Le Président de l'APCE en Arménie

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Traduction Gérard Merdjanian - commentaires

Suite au refus du parlementaire turc de déposer une gerbe au mémorial du génocide, la raison donnée par le gouvernement arménien est pour le moins ‘tirée par les cheveux', pour ne pas dire incongrue. Lorsqu'on connaît le parcours politique de l'actuel président de l'APCE, c'est le contraire qui aurait été étonnant.

En effet, Mevlüt Çavusoglu est non seulement député de la majorité mais également cofondateur du ‘Parti Justice et Développement' (Adalet ve Kalkınma Partisi ou AKP) au pouvoir en Turquie depuis 2002 et ayant à sa tète le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan.

Aussi, il ne fait aucun doute qu'il appuiera là où cela fait mal, c'est-à-dire sur les événements postélectorales tragiques du 1er mars 2008, mais surtout sur le conflit du Haut-Karabakh. D'ailleurs n'a-t-il pas annoncé la création d'une commission de l'APCE pour traiter de la question. Comme si le groupe de Minsk de l'OSCE ayant à sa tête les Etats-Unis, la Russie et la France, ne suffisait pas.

Il suit en cela la politique turque, qu'elle soit ottomane ou azérie, d'amener la question devant les instances internationales et plus particulièrement devant l'ONU, voire le Conseil de sécurité onusien.

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Le Président de l'Assemblée Parlementaire du Conseil de l'Europe, Mevlüt Çavusoglu, débute une visite en Arménie les 12 et 13 mai, au cours de laquelle il rencontrera le Président de la République Serge Sarkissian, le Président de la l'Assemblée nationale Hovik Abrahamian, le ministre des Affaires étrangères Edward Nalbandian, les membres des différents groupes politiques représentés à l'Assemblée nationale, ainsi que l'opposition extra-parlementaire.

Il rencontrera également David Haroutiounian, le président de la Commission permanente de l'Assemblée sur les Affaires juridique et de l'Etat, les responsables de la surveillance de la mise en œuvre des recommandations proposées par la Commission ad hoc de l'Assemblée pour enquêter sur les événements du 1er Mars 2008. Des entretiens sont également prévus avec le médiateur, les membres de la communauté diplomatique et la société civile.

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Le chef de l'APCE a informé les autorités arméniennes qu'il ne se rendra pas au mémorial du génocide arménien. Les sources gouvernementales ont confirmé l'information. Un dépôt de gerbe au mémorial Dzidzernagapert fait normalement partie de l'itinéraire des dignitaires étrangers en visite officielle.

"Aucune visite au Dzidzernagapert n'est prévue, puisque Mevlüt Çavusoglu effectue une visite de travail en Arménie," a déclaré la directrice du département des relations publiques de l'Assemblée nationale arménienne, Kohar Boghossian à ‘Radiolour'.

"Çavusoglu va avoir que des réunions de travail, et rien d'autre n'est prévu," a-t-elle ajouté, soulignant que les officiels qui visitent habituellement le Madénatarane, Dzidzernagapert et autres lieux symboliques le font lors de visites officielles.

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Dans une lettre adressée à Abrahamian, le président du groupe parlementaire de la FRA, Vahan Hovannisian, a condamné la décision Çavusoglu de ne pas se rendre au mémorial, disant que "c'est incorrect lorsqu'on est à la tête d'une organisation internationale faisant autorité."

"Les dirigeants de l'APCE n'avaient jamais montré une telle attitude irrespectueuse avant, indépendamment de savoir si leur pays avait ou pas reconnu le génocide arménien. En effet, M. Çavusoglu ne fait aucun mystère du fait qu'il est en visite non pas tant comme président de l'APCE que comme homme politique turc. Dans ces conditions, notre groupe ne trouve pas opportun de le rencontrer."

Dans un entretien séparé avec Armenialiberty, Hovannisian a exhorté les groupes parlementaires à faire de même. "Naturellement, Çavusoglu sera toujours le président turc [de l'APCE] et placera les intérêts turcs en premier. Aucun politicien turc n'a atteint un niveau suffisant d'ouverture d'esprit européen et ne l'atteindra dans un proche avenir," a-t-il ajouté.

Les parlementaires de la majorité : Parti Républicain, Parti Arménie Prospère (BHK) et Parti Orinats Yerkir (Pays de Lois) ont clairement indiqué qu'ils ne bouderont pas le parlementaire turc.

Aram Safarian, député BHK, a déclaré que les membres de son groupe diront à Çavusoglu qu'ils sont très circonspects quant aux efforts qu'il compte déployer pour que le conflit non-résolu du Haut-Karabakh soit débattu par la structure européenne [APCE], basée à Strasbourg. "Nous voyons cela comme faisant partie des efforts continus de la Turquie pour travailler comme médiateur dans un conflit où ses positions à l'égard de notre pays ne sont pas équilibrées et impartiales," a indiqué Safarian, se référant au soutien inconditionnel d'Ankara à l'Azerbaïdjan.

Le Parti d''opposition Jarankoutioun (Héritage) décidera Mardi s'il convient de rencontrer Çavusoglu. L'un de ses dirigeants, Stépan Safarian, s'est prononcé en faveur d'une telle réunion. Il a indiqué que les élus de Jarankoutioun profiteront de l'occasion pour exprimer "leur attitude et leurs ressentiments" sur la politique du gouvernement turc envers l'Arménie.

Le principal Parti d'opposition non-parlementaire, le Congrès National Arménien (HAK), a également accepté de s'entretenir avec le président de l'APCE. Mais il n'est pas sûr que son leader, l'ex-président Levon Ter-Pétrossian, soit présent.

Extraits de la Radio Publique d'Arménie et de Armenialiberty